J’étais en cuisine, occupée à découper des légumes pour le dîner, lorsque la sonnette retentit brusquement. Il était tard et je n’attendais personne.
Notre maison était toujours calme en soirée. Les enfants dormaient déjà, et mon mari travaillait tard dans son bureau. Rarement, nous recevions des visites à une heure pareille. Intriguée, je regardai l’horloge : 20h45. Qui pouvait bien venir à cette heure ?
En me dirigeant vers la porte, je tentai de me rassurer : peut-être une voisine, venue emprunter quelque chose comme cela arrivait parfois.
Mais une étrange sensation d’inquiétude s’empara de moi. Quelque chose ne tournait pas rond.
J’ouvris la porte… et mon cœur manqua un battement.
Une femme se tenait sur le seuil.
Elle était pâle, ses cheveux sombres en bataille, et son visage exprimait fatigue et confusion. Une impression de déjà-vu me frappa, mais aucun souvenir précis ne me vint immédiatement.
Puis elle prononça mon nom d’une voix familière :
— Tanya…
Un vertige me prit. C’était Olga.
La première femme de mon mari.
Le passé refait surface
Je restai figée sur le pas de la porte, incapable de réagir.
Olga avait disparu de notre vie des années auparavant, après la fin de son mariage avec Igor. Je ne l’avais jamais rencontrée en personne. Tout ce que je savais d’elle venait de ce que mon mari m’avait raconté – ce qui, à vrai dire, était peu. Il évitait d’évoquer leur passé commun, comme s’il s’agissait d’un chapitre clos et sans importance.
Mais là, elle était devant moi. Devant sa maison.
— Olga ? murmurai-je, abasourdie.
Elle hocha la tête et, après un profond soupir, déclara d’une voix grave :
— Nous devons parler. C’est à propos d’Igor.
Un secret longtemps enfoui
Nous nous installâmes dans la cuisine. Un silence pesant flottait entre nous. Olga fixait la tasse de thé que je lui avais donnée, semblant chercher ses mots.
Enfin, elle brisa le silence :
— Je sais que ma présence ici est une surprise… mais tu dois connaître la vérité.
Ses paroles me firent frissonner. De quoi parlait-elle ?
Je resserrai mes doigts autour de ma propre tasse, une vague d’angoisse montant en moi.
— Quelle vérité ? demandai-je d’une voix plus dure que prévu.
Elle hésita un instant, prit une profonde inspiration, puis déclara :
— Igor ne t’a pas tout dit. Notre séparation n’a pas eu lieu simplement parce que nous ne nous entendions plus. Il a fait quelque chose que tu dois savoir.
Une froideur soudaine envahit mon corps.
Que voulait-elle dire ?
Mon mari m’avait toujours semblé honnête, droit, loyal. Qu’aurait-il pu cacher ?
— Olga, sois claire. Mon ton était plus sec que je ne l’aurais voulu. Que veux-tu dire exactement ?
Elle me fixa, son regard empli de lassitude et de douleur.
— Il m’a trompée, Tanya. Pendant longtemps. Et ce n’était pas une simple erreur passagère. J’ai découvert la vérité trop tard, quand tout était déjà fini.
Son aveu me frappa comme une tempête glaciale.
Igor ? Infidèle ? Impossible.
Nous étions ensemble depuis cinq ans, et jamais je n’avais eu le moindre doute sur sa fidélité. Comment pouvais-je croire cela ?
— Tu dois te tromper, répliquai-je vivement, la colère montant en moi. Igor n’est pas comme ça. Il n’a jamais rien fait qui pourrait me faire douter de lui.
Mais Olga ne détourna pas le regard.
— Je pensais la même chose, dit-elle doucement. Mais c’est arrivé. Et je ne voulais pas que tu sois dans la même situation que moi.
Le regard d’Igor a tout confirmé
Lorsque Olga quitta la maison, je restai immobile, bouleversée, les pensées tournoyant dans ma tête.
Et si elle disait la vérité ? Et si Igor me cachait réellement quelque chose ?
Quand il rentra ce soir-là, je n’eus pas la patience d’attendre.
Dès qu’il franchit la porte, je lançai :
— Igor, as-tu parlé à Olga récemment ?
Il se figea une fraction de seconde, puis reprit un air normal en enlevant sa veste.
— Olga ? Non, cela fait des années. Pourquoi cette question ?
Je pris une grande inspiration avant d’annoncer d’une voix ferme :
— Elle est venue ce soir. Elle m’a dit que tu l’avais trompée.
Igor se raidit. Une ombre passa sur son visage.
Ce fut suffisant pour moi. Je compris que c’était vrai.
— Dis-moi que ce n’est pas vrai, Igor. Ma voix tremblait. Dis-moi que c’est un mensonge.
Il baissa la tête, poussa un long soupir, puis s’assit lentement sur une chaise.
— Tanya… c’était il y a longtemps, murmura-t-il. Je n’en suis pas fier. Notre couple allait déjà mal, et j’ai fait une erreur. Mais c’est du passé. Depuis, je n’ai plus jamais trahi personne.
Je serrai les poings.
— Pourquoi ne me l’as-tu jamais dit ?
— Parce que cela ne te concernait pas. C’était une autre époque, une autre relation. J’ai changé.
Mais avait-il vraiment changé ?
Réparer l’irréparable
Les jours passèrent, mais rien ne fut plus pareil.
Je voulais croire qu’Igor était un homme différent. Mais comment être certaine que ce qu’il avait fait à Olga ne se répéterait pas avec moi ?
Le doute s’était immiscé entre nous, créant une distance invisible mais omniprésente.
Un soir, alors que nous étions assis en silence, ce fut Igor qui prit la parole :
— Je comprends que tu ne me fasses plus confiance. Mais je veux me racheter. Il marqua une pause, cherchant ses mots. Je suis prêt à faire tout ce qu’il faut pour reconstruire notre relation.
Ses paroles semblaient sincères. Mais pouvais-je réellement lui pardonner ?
Reconstruire… ou partir ?
Les mois qui suivirent furent difficiles. Nous décidâmes de consulter un thérapeute de couple. Igor fit des efforts sincères, cherchant à regagner ma confiance.
Petit à petit, nous nous rapprochâmes à nouveau. Mais je savais que notre relation ne serait plus jamais la même.
Le passé ne peut pas être changé, mais l’avenir… l’avenir, lui, peut être construit.
Et cette fois, ce serait sur une base de vérité absolue.