Depuis près de vingt ans, je vivais paisiblement dans ma petite maison de banlieue. Mon jardin, soigneusement entretenu, était ma fierté : une pelouse impeccable, des fleurs bien arrangées et surtout, une clôture en bois qui marquait la frontière entre ma propriété et celle d’à côté.
Elle n’avait rien d’exceptionnel, cette clôture. Simple, vieillissante, mais robuste et fonctionnelle. Elle m’avait accompagné depuis mon emménagement, préservant mon intimité sans jamais poser de problème.
Puis vint Éric, le nouveau voisin.
Un trentenaire dynamique, toujours pressé, affichant un air de supériorité à chaque conversation. Il roulait dans une voiture clinquante, parlait fort et semblait convaincu de toujours avoir raison. Il était poli en surface, mais quelque chose en lui me dérangeait, une impression qu’il ne respectait pas vraiment les autres.
Une intrusion inacceptable
Un samedi matin, alors que je savourais mon café après une séance de jardinage, un bruit étrange m’a alerté. Des coups de marteau, suivis de grincements métalliques.
Intrigué, je me suis approché pour voir ce qui se passait… et j’ai découvert Éric en train de démonter ma clôture !
— Éric ! Qu’est-ce que tu fais ? ai-je lancé, la voix pleine d’incrédulité.
Il s’est retourné, l’air décontracté, un sourire suffisant au coin des lèvres.
— Oh, salut ! Je répare cette vieille barrière. Elle tombait en ruine, alors je vais mettre quelque chose de plus moderne.
J’ai cligné des yeux, essayant d’assimiler ses paroles.
— Attends… tu remplaces MA clôture ?
Il a haussé les épaules.
— Oui, pourquoi pas ? Elle était vieille et franchement, elle ne servait à rien. Avec une belle clôture en métal, ça donnera un coup de neuf au quartier.
J’étais abasourdi par son culot. Non seulement il prenait l’initiative de modifier ma propriété sans me prévenir, mais il osait en plus me faire la leçon sur l’esthétique du quartier ?
— Éric, tu dois arrêter immédiatement. Cette clôture m’appartient. Si tu voulais proposer un changement, il fallait d’abord m’en parler.
Il a levé les yeux au ciel, visiblement agacé par ma réaction.
— Allez, ce n’est qu’une clôture ! Je fais ça pour rendre service, tu verras, tu me remercieras plus tard.
— Non, Éric. Ce n’est pas comme ça que ça marche.
Ma patience atteignait ses limites. On ne prend pas de décisions sur la propriété des autres sans leur accord.
Il m’a regardé comme si j’étais borné, incapable de comprendre la “bonne” initiative qu’il prenait.
— Bon, d’accord, si ça te tient tant à cœur… Je laisse tomber.
Il a posé son marteau avec une exagération dramatique, comme si j’étais le méchant de l’histoire.
Mais cette affaire n’allait pas s’arrêter là.
Une leçon à retenir
Le lendemain matin, j’ai appelé la mairie pour vérifier les règles locales concernant les clôtures.
Comme je le pensais : toute modification des limites de propriété devait être approuvée par les deux voisins et nécessitait un permis.
Mieux encore, Éric n’avait aucune autorisation pour entreprendre ces travaux.
Je ne voulais pas être mesquin, mais il était temps que mon cher voisin comprenne que tout ne lui était pas permis.
Dans l’après-midi, je l’ai abordé calmement :
— Éric, j’ai vérifié avec la mairie. Tu n’as pas le droit de modifier une clôture sans mon accord. Et, en plus, il te faut un permis.
Il a soupiré, agacé.
— Sérieusement ? Tu es du genre à aller fouiner dans les règlements municipaux ?
— Non, je suis du genre à protéger ma propriété.
Il a essayé de minimiser la situation, mais après quelques appels de rappel de la mairie, il a bien compris qu’il ne pouvait pas ignorer la loi.
Un respect (enfin) retrouvé
Le week-end suivant, Éric est venu me voir d’un air plus humble.
— Jean, j’ai regardé les règles, et… je crois que j’ai un peu dépassé les bornes. Désolé de ne pas t’avoir demandé avant.
J’ai croisé les bras, sans le ménager.
— C’est simple, Éric. Tu es nouveau ici, mais ce n’est pas une raison pour décider à la place des autres. Le respect, ça fonctionne dans les deux sens.
Il a hoché la tête, et finalement, nous avons convenu de remettre la clôture en état ensemble.
Éric avait appris une leçon essentielle : on ne joue pas avec la propriété des autres.
Parfois, il ne s’agit pas de confrontation, mais simplement de poser des limites claires.
Et s’il y a une chose que j’ai retenue de cette histoire, c’est que le respect, ça ne se demande pas – ça s’impose.