« Monsieur, s’il vous plaît, aidez-nous, nous sommes perdus… » implorèrent les enfants en s’adressant à un cueilleur de champignons, sans se douter que leur demande allait les entraîner vers un destin inattendu.

Advertisements

Depuis son enfance, Viktor accompagnait ses parents en forêt pour cueillir des baies et des champignons. Bien que ses parents soient décédés depuis longtemps, il avait perpétué cette tradition, arpentant chaque sentier comme s’il connaissait la forêt par cœur.

Advertisements

Cet endroit lui procurait une paix indescriptible. Homme discret et solitaire, Viktor s’y réfugiait souvent, loin du tumulte du monde. Il portait en lui le souvenir d’un amour perdu—sa fiancée, qu’il avait dû quitter il y a des années, sans jamais la revoir. Chaque promenade sous les feuillages lui rappelait ces jours heureux où ils pique-niquaient en famille, insouciants, à la recherche des meilleurs champignons.

Ce jour-là, un matin d’automne comme les autres, il s’aventura dans les bois, suivant son itinéraire habituel. Mais quelque chose clochait. Il remarqua des traces fraîches de petites chaussures, des buissons écrasés et des champignons piétinés. Irrité, il pensa aussitôt à des enfants venus jouer sans respecter la nature.

Puis, un son attira son attention.

Des voix enfantines résonnaient entre les arbres. D’abord mécontent, il s’apprêtait à les réprimander, mais rapidement, leurs appels à l’aide se transformèrent en pleurs déchirants.

Advertisements

— Aidez-nous ! Nous sommes perdus !

Intrigué, Viktor accéléra le pas jusqu’à découvrir deux enfants en larmes. Leurs vêtements étaient sales et déchirés, témoignant de leur errance dans la forêt.

Le plus grand, un garçon d’environ huit ans, s’avança vers lui.

— Monsieur, s’il vous plaît, aidez-nous. On ne sait plus comment rentrer chez nous.

Le ton de Viktor s’adoucit instantanément.

— Où habitez-vous ? Vous souvenez-vous du nom du village ?

L’enfant jeta un regard hésitant à sa petite sœur avant de baisser les yeux.

— On était chez notre grand-mère… On est sortis jouer, puis on a couru après des lézards… et on s’est perdus.

— Et le nom du village ? Ou de la rue où elle habite ? insista Viktor.

Les enfants se regardèrent, impuissants. Trop jeunes, ils n’avaient jamais retenu ces détails.

Soudain, le garçon sembla se souvenir de quelque chose.

— Attendez ! Mamie nous a donné ça, juste au cas où…

Il sortit un petit médaillon suspendu à son cou et l’ouvrit. À l’intérieur, une inscription manuscrite indiquait leur adresse.

Viktor plissa les yeux, essayant de déchiffrer les caractères. Il chercha ses lunettes et se concentra sur l’écriture… mais un détail le troubla.

Ce médaillon… Il le connaissait.

Son souffle se coupa.

— Où avez-vous trouvé ça ? demanda-t-il, sa voix tremblante.

— C’est mamie qui nous l’a donné, répondit l’enfant avec innocence.

Le cœur de Viktor battait à tout rompre.

— Votre grand-mère ? Comment s’appelle-t-elle ?

— Galina… Elle doit être en train de nous chercher.

Un vertige le saisit.

— Galina… Ma Galina… murmura-t-il.

Avant de partir à la guerre, Viktor avait confié ce médaillon à sa fiancée. Il lui avait promis de revenir. Mais lorsqu’il était rentré, son village avait été détruit, et il n’avait jamais retrouvé sa trace.

Les enfants ne comprenaient pas l’émotion qui submergeait Viktor.

— Si ce médaillon est si important pour vous, vous pouvez le garder, proposa timidement la petite fille.

Viktor secoua la tête, un mélange d’espoir et d’incrédulité dans le regard.

— Je pense que nous sommes de la même famille…

Il raccompagna les enfants jusqu’à sa voiture et prit la route vers le village.

Quand ils arrivèrent, les petits coururent vers leur grand-mère.

— Mamie ! On est là ! Et regarde qui on a rencontré !

Une femme d’un certain âge sortit précipitamment de la maison, visiblement inquiète.

Viktor s’approcha, le souffle court.

— Excusez-moi… Comment vous appelez-vous ?

— Valentina… Et vous ? répondit-elle, intriguée.

— Votre mère… s’appelait-elle Galina ? Auriez-vous une photo d’elle ? demanda Viktor, son cœur battant plus fort.

— Oui, mais comment savez-vous ça ? Venez, entrez, je vais vous montrer.

Assis à la table, il feuilleta un vieil album photo. Il retrouva enfin le visage qu’il n’avait cessé d’aimer.

— Galina… Ma Galina… murmura-t-il, les larmes coulant sur ses joues.

Valentina le fixa, interdite.

— Mais… comment la connaissez-vous ?

— Je crois… que je suis votre père.

Elle eut un rire nerveux.

— Ce n’est pas possible. Mon père est mort à la guerre avant ma naissance. Je ne l’ai jamais connu.

Viktor sortit une vieille photo de sa poche. Une photo de lui et Galina, prise juste avant son départ au front.

Les yeux de Valentina s’embuèrent.

— C’est elle… et c’est vous ?

Un silence profond s’installa. Puis, d’un geste hésitant, Valentina prit la main de Viktor.

— Tout ce temps… Je n’ai jamais su…

Les jours suivants furent remplis d’émotions. La nouvelle se répandit dans la famille. Lorsque les parents des enfants arrivèrent au village, ils eurent du mal à croire ce qui s’était passé.

Viktor, qui avait cru vivre et mourir seul, retrouvait enfin ce qu’il avait toujours cherché : une famille. Son petit-fils, le père des enfants, était son héritier.

Un soir, alors qu’ils partageaient un repas, Valentina posa doucement une main sur celle de Viktor.

— Papa… Si tu ne veux plus être seul, viens vivre avec moi. J’ai une grande maison.

Les yeux de Viktor s’illuminèrent.

— J’accepte… J’ai attendu ce moment toute ma vie.

Ainsi, à la fin de son voyage, il trouva enfin ce qu’il avait toujours espéré : l’amour d’une famille, un foyer, et la paix dans son cœur.

Advertisements