Lorsque mon voisin a qualifié ma vieille berline adorée de « laideur », il a décidé de prendre les choses en main en me jouant un sale tour. Il ne savait pas encore que cette nuit-là, le karma lui donnerait une leçon bien méritée.
Je n’aurais jamais imaginé vivre dans un quartier où chaque allée est ornée de voitures de luxe rutilantes et où les jardiniers s’affairent chaque jeudi matin avec une précision presque militaire. Pourtant, grâce au programme de logement de mon entreprise, j’y avais posé mes valises… avec ma précieuse berline cabossée, une 1989 ayant appartenu à mon père.
Cette voiture représentait tout pour moi. Chaque bosse et chaque rayure racontait une histoire : l’enfoncement sur le pare-chocs, vestige de mes premières tentatives de stationnement en parallèle avec mon père ; la fissure sur le tableau de bord, là où il tapotait en rythme avec Johnny Cash. Après sa disparition, l’entretenir était devenu ma façon de garder un lien avec lui.
Une Rencontre Peu Amicale
Un matin d’automne, alors que je lavais amoureusement ma voiture, un bruit de pas sur les feuilles mortes attira mon attention.
— « Excusez-moi, mademoiselle. »
Je levai les yeux et me retrouvai face à Tom, mon voisin tiré à quatre épingles, vêtu comme s’il sortait tout droit d’une publicité de vêtements de golf hors de prix.
— « Appelez-moi Lila, » répondis-je avec un sourire en continuant mon nettoyage.
Il ignora ma réponse et désigna ma voiture avec un geste dédaigneux.
— « Cette… chose est une véritable horreur. »
Le ton était donné. Il enchaîna sur la manière dont ma vieille voiture nuisait à l’esthétique du quartier et faisait baisser la valeur des propriétés. Avant de partir, il lâcha une menace déguisée :
— « Si cette épave n’a pas disparu d’ici une semaine, je veillerai personnellement à ce que vous n’ayez plus d’autre choix que de la remplacer. »
Je haussai les épaules, refusant de céder. Mais une semaine plus tard, je réalisai jusqu’où il était prêt à aller.
Un Geste Méprisable
Ce matin-là, je sortis et découvris ma voiture emprisonnée dans un véritable bloc de glace. Il ne s’agissait pas d’un simple gel nocturne, mais d’un acte délibéré. Quelqu’un l’avait clairement arrosée d’eau toute la nuit, la figeant dans une gangue glacée.
Depuis son perron, Tom me regardait avec un sourire suffisant, une tasse de café à la main.
— « Eh bien, Lila, il semblerait que l’hiver soit particulièrement rude cette année ! »
Furieuse, je l’accusai d’avoir fait cela. Il haussa les épaules.
— « Prouvez-le. Ou mieux encore, débarrassez-vous de cette voiture. »
Je passai des heures à la dégeler, jurant intérieurement. Mais mon père m’avait toujours dit :
— « La meilleure vengeance, c’est de vivre bien et de garder les mains propres. »
Ce soir-là, alors que je pensais encore à la manière dont j’aurais pu riposter, le karma se chargea de tout.
Quand le Destin S’en Mêle
Dans la nuit, une bouche d’incendie située juste devant la maison de Tom explosa. Un geyser d’eau se déversa sur sa façade et son rutilant SUV. Avec les températures glaciales, tout fut recouvert d’une épaisse couche de glace.
Le lendemain matin, Tom, une pelle à la main, tentait désespérément de dégager son allée verglacée. Je le regardai un instant, puis, dans un élan de générosité inattendu, attrapai mon grattoir et lui proposai mon aide.
Il hésita, puis accepta à contrecœur. Nous travaillâmes ensemble en silence, le froid mordant nos doigts.
Un Geste Inattendu
Le jour suivant, Tom frappa à ma porte. Il semblait mal à l’aise et me tendit une enveloppe.
— « C’est pour réparer votre voiture ou en acheter une autre. »
À l’intérieur, 5 000 dollars en liquide.
Je pris l’argent sans un mot, un sourire en coin. Une semaine plus tard, ma fidèle berline brillait d’une nouvelle peinture, avec un moteur remis à neuf.
Tom l’observait parfois, un mélange de respect et d’agacement dans le regard. Quant à moi, je repensais à mon père et à ses paroles.
Parfois, la meilleure vengeance, c’est de ne pas se venger du tout.