Silences Brisés et Trahisons Muettes

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Silences Brisés et Trahisons Muettes

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— Quelle insolente créature tu es ! — hurla violemment Monique, le visage crispé par la colère.

Sa main fendit l’air et gifla brutalement Claire à l’arrière de la tête, le son sec résonnant comme un claquement de fouet, tranchant le calme de la galerie d’art. La cuillère que Claire tenait tomba dans sa tasse encore chaude, et son cœur bondit. Elle ferma brièvement les yeux, envahie par une onde de honte et de rancune — ce n’était pas la première attaque verbale de Monique, mais c’était la première fois qu’elle levait la main sur elle.

Monique méprisait Claire, sa collègue plus jeune, brillante et raffinée. Dans cette galerie où elles travaillaient toutes les deux, Monique — une ancienne ouvrière dans une imprimerie désaffectée — se sentait constamment éclipsée par l’attitude assurée de Claire, par son pull orange vif, ses cheveux brillants, ses idées neuves. Elle voyait en elle une prétentieuse citadine, une menace déguisée en charme.

Et cela ne fit que s’aggraver lorsque Laurent, le directeur de la galerie — un homme réservé au manteau noir toujours impeccablement porté — commença à confier à Claire les clients importants, les expositions de prestige. Monique, reléguée à des tâches de logistique ou à la vente de reproductions, bouillonnait de jalousie. Elle s’acharna à discréditer Claire en privé.

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Mais ce jour-là, devant un collectionneur, Claire la reprit doucement sur une erreur d’inventaire. Laurent sourit, hocha la tête à Claire — et ce fut trop pour Monique. Elle explosa.

— Tu crois être au-dessus des autres, hein ? Regarde-toi, avec ta voix douce et tes airs de Versailles ! Tu crois que Laurent t’a choisie pour ton talent ? Pauvre idiote !

La gifle partit à ce moment-là, incontrôlable. Claire recula d’un pas, tremblante. Elle leva les yeux vers Laurent, espérant une réaction, un mot. Il sourit, mais d’un sourire gêné.

— Monique est un peu… impulsive, tu sais comment elle est, murmura-t-il en posant une main sur l’épaule de la femme plus âgée.

Claire sentit une brûlure monter jusqu’aux paupières. Alors, calmement, elle partit du hall, descendit les escaliers de marbre blanc sans un mot. Elle marcha longtemps dans la ville, ses bottes claquant contre les pavés. Elle passa la soirée seule, à contempler la Seine, son sac sur les genoux, se demandant comment elle avait pu croire qu’elle avait trouvé sa place.

Le lendemain matin, Laurent entra dans la galerie, en retard comme toujours, en jetant un œil distrait aux toiles modernes qui pendaient aux murs. Monique était déjà là, occupée à déplacer un socle. Mais quelque chose manquait.

— Où sont passés les classeurs de ventes ? Et le carnet des rendez-vous ? Et… où est passé le tableau de Dubois ?

Il ne comprenait pas. Monique haussa les sourcils, puis blêmit.

— La réserve a été vidée. Les œuvres de Claire… ses croquis, ses archives… tout s’est envolé !

Laurent ouvrit son ordinateur portable resté derrière le comptoir. Bloqué. Tous les fichiers concernés avaient été supprimés. Seule une note manuscrite flottait sur le clavier :

« Quand on est trop poli, on s’efface. Moi, j’ai décidé cette fois de ne pas disparaître sans laisser de marques. »

Le reste du mois, la galerie dû affronter les appels de clients furieux, les rendez-vous manqués, les incohérences comptables. Laurent comprit trop tard que Claire avait tout organisé. Elle avait supprimé ses traces, effacé son passé dans l’entreprise comme on nettoie un tableau maculé.

Monique, elle, garda le silence. Elle avait gagné une bataille, cru-elle. Mais dans les couloirs vides de la galerie, ce triomphe pesait lourd.

Il restait le silence. Et les murs. Et ce sentiment insupportable d’avoir détruit quelque chose qu’on ne pouvait plus réparer.

Le Poids du Silence et les Ombres du Passé

Quelques jours après le chaos, la galerie semblait figée dans une atmosphère lourde, presque palpable. Dans l’intimité d’une salle d’exposition, Laurent, Monique, et une mystérieuse femme blonde vêtue d’un pull beige discutaient vivement. Marie, une amie artiste de Claire venue en secret, regardait les deux femmes se toiser.

« Je ne pouvais pas laisser Monique ruiner tout ce que Claire a construit, expliqua Marie d’une voix douce mais ferme, en désignant une toile accrochée au mur. C’est injuste. Claire mérite d’être reconnue, pas effacée. »

Monique, serrant les dents, répliqua : « Vous ne comprenez rien à notre monde ici. C’est une lutte de pouvoir, pas une galerie de rêve. »

Laurent, le regard sombre sous son manteau noir, tenta d’apaiser les tensions : « Nous devons trouver un compromis. Ces conflits nous déchirent. Il faut une solution pour avancer. »

Au dehors, la lumière tamisée filtrait à travers les grandes fenêtres, projetant des ombres incertaines sur les tableaux modernes. Marie proposa alors : « Claire ne reviendra peut-être pas, mais nous pouvons organiser une exposition à son honneur, montrer ses œuvres, dévoiler la vérité derrière son départ. »

Le souffle court, Monique sentit un poids s’évaporer, mêlé à une douleur sourde. « Peut-être… C’est ce qu’elle aurait voulu. »

Le trio se regarda, hésitant entre rancunes passées et espoirs fragiles. Une alliance inattendue naissait, dans le silence finalement brisé de la galerie d’art, où les cœurs commençaient à battre au rythme d’une possible réconciliation.

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