Mishka, un garçon de douze ans, était un enfant vif et plein de ressources. Il vivait avec sa mère, Tamara, une femme qui l’élevait seule. Leur existence était modeste, mais Mishka ne se plaignait jamais. Il se contentait de ce qu’il avait, trouvant du bonheur dans les petits moments partagés avec sa mère. Pourtant, au fil des années, leur vie avait basculé. Tamara, jadis passionnée de littérature et employée dans une bibliothèque, avait vu ses rêves s’effondrer lorsque l’établissement avait fermé ses portes. Cette perte, cumulée à une solitude pesante et des déceptions amoureuses, l’avait lentement plongée dans l’alcool.
Autrefois, elle lui racontait des histoires le soir et préparait des gâteaux qui embaumaient leur petit appartement. Aujourd’hui, elle passait ses soirées entourée d’étrangers aux visages troubles, noyant son chagrin dans des verres qui semblaient sans fond. Son regard autrefois brillant était devenu terne, son sourire éphémère. Mishka, bien que jeune, comprenait tout cela mieux qu’il ne l’aurait voulu. Il avait grandi trop vite, assumant des responsabilités bien au-delà de son âge. Il préparait ses repas, nettoyait l’appartement et essayait de suivre l’école du mieux qu’il pouvait, malgré les nuits blanches passées à veiller sur sa mère.
Malgré tout, Mishka restait un enfant résilient. Il trouvait du réconfort dans le dessin, une passion qui lui permettait d’exprimer ses émotions sans avoir besoin de mots. Ses professeurs savaient ce qu’il traversait et, bien que compatissants, ils ne pouvaient réellement changer sa situation. Parfois, il arrivait en classe sans avoir fait ses devoirs, utilisant les récréations pour rattraper son retard. Personne ne lui faisait de reproches.
Un après-midi d’hiver, alors qu’il rentrait de l’école, il marchait la tête basse, perdu dans ses pensées. Il faisait un froid mordant, et la neige crissait sous ses pas. Absorbé par ses soucis, il faillit ne pas entendre le petit sanglot qui brisa le silence du chemin. En relevant les yeux, il aperçut une fillette recroquevillée sur le sol gelé.
Il s’approcha rapidement.
— Tu vas bien ? demanda-t-il doucement.
La petite leva vers lui des yeux embués de larmes. Elle semblait avoir cinq ou six ans, était vêtue d’un manteau trop fin pour le froid et n’avait ni chapeau ni gants. Ses cheveux emmêlés et ses joues rougies par le vent la rendaient encore plus fragile.
— J’ai faim… murmura-t-elle entre deux sanglots. Je veux rentrer chez moi… mais je ne sais pas où c’est.
Mishka ressentit une pointe de douleur en l’entendant. Il connaissait trop bien cette sensation de faim. Sans hésiter, il plongea sa main dans sa poche et en sortit quelques pièces qu’il avait mises de côté. Il courut vers un kiosque et revint rapidement avec une petite brioche.
— Tiens, mange.
La fillette attrapa la brioche avec empressement et la dévora. Mishka la regarda faire en silence, ressentant à la fois une satisfaction et une tristesse profondes. Il attendit qu’elle finisse avant de lui demander son nom.
— Lusia, répondit-elle en relevant enfin les yeux vers lui. J’habite avec mon papa dans un grand château. Mais ma belle-mère m’a emmenée ici… je ne voulais pas rester avec elle, alors je me suis enfuie.
Mishka haussa un sourcil. Un château ? Il n’y avait aucun bâtiment de ce genre dans les environs. Mais avant qu’il ne puisse poser d’autres questions, une voiture noire et luxueuse s’arrêta brusquement près d’eux.
Une femme descendit, vêtue d’un manteau de fourrure, le regard à la fois inquiet et irrité.
— Lusia ! s’exclama-t-elle. Je t’ai cherchée partout !
Elle s’approcha rapidement et prit la main de la fillette. Lusia, en la voyant, sembla se figer, un mélange de peur et de culpabilité dans les yeux.
— Combien de fois t’ai-je dit de ne pas partir sans permission ?! Tu te rends compte du danger ?
Mishka, mal à l’aise, tenta d’expliquer.
— Elle était seule et affamée… Je lui ai acheté à manger.
La femme posa enfin les yeux sur lui. Son regard était froid, presque distant.
— C’était bien aimable de ta part, dit-elle d’une voix où perçait une pointe de condescendance. Mais cela ne te concerne pas.
Mishka baissa les yeux. Elle avait raison, en un sens, mais l’indifférence qu’elle affichait lui serra le cœur. Lusia, avant de monter dans la voiture, lui adressa un dernier regard triste et souffla un timide :
— Merci…
La portière claqua, et la voiture disparut au coin de la rue.
Mishka resta un instant immobile, l’esprit troublé. Il avait donné tout ce qu’il pouvait, mais il avait l’impression que cela ne suffisait pas. Un profond sentiment d’impuissance l’envahit. Il rentra chez lui, songeur, se demandant pourquoi la vie était si injuste, et pourquoi certains avaient tant alors que d’autres n’avaient rien.
Il savait une chose pourtant : il ne laisserait jamais la souffrance le définir. Il continuerait à tendre la main à ceux qui en avaient besoin, parce que, malgré tout, il croyait encore en la bonté du monde.

Un jeune garçon a sauvé une fillette perdue – Des années plus tard, un événement inattendu a changé leur vie de manière irréversible.
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